29 juillet 2015

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10 février 2013

Brève histoire d'Arkhangelsk

La ville portuaire d'Arkhangelsk est située sur la rive est de la mer Blanche, à l'embouchure de la Dvina septentrionale. Mille deux cent kilomètres la séparent de Moscou, une distance équivalente de Saint Petersbourg. Il semblerait que cette région ait été habitée dès le VIIIe siècle ce que semblerait attester la découverte (en 1989) d'un important trésor constitué de monnaies provenant de différentes régions d'Europe et datant du Xe siècle, faisant évoquer une activité commerciale locale dès cette époque. C'est au XIIe siècle que le monastère de l'archange St Michel est construit sur une île de l'estuaire du fleuve par des moines russes de Novgorod. La principale agglomération commerciale de la région se situe alors à une petite centaine de kilomètres du monastère, au confluent de la Dvina et de la rivière Pinega et porte le nom de Kholmogory. La région fut le siège de nombreux combats opposant Russes et habitants du nord de l'actuelle Norvège. Ce sont ces derniers qui, en 1419, ravagèrent le monastère lors d'un raid maritime en mer Blanche. En 1478, les Norvégiens sont boutés hors du territoire qui, pacifié, ne quittera plus la Russie.

Une région de commerce
Dès 1555, après l'arrivée en mer Blanche d'un bâtiment anglais (Edward Bonaventure sous les ordres du capitaine Sir Richard Chancellor) à la recherche, déjà, du passage du Nord-est, des liens commerciaux s'établirent, sous l’impulsion de l’empereur Ivan IV, dit le Terrible, entre Russes et Anglais. Rapidement, dans les années qui suivent, les Hollandais et les Écossais viennent également commercer en mer Blanche. Il est donc logique d'établir, comme le décide l'empereur en 1584, une nouvelle cité à l'embouchure même du fleuve, comme il est logique de lui donner le nom de Novo Kholmogory. Elle perdra ce nom en 1613 au profit de son nom actuel (en souvenir du monastère situé non loin de là).
C'est ici que Pierre le Grand découvre la mer en juillet 1693 et l'on sait la fascination qu'elle exercera sur lui. L'année suivante, il décide d'y implanter un chantier naval et d'y faire construire la flotte nécessaire à la grandeur de la Russie. Il y installe également l'amirauté russe. En effet, même si la situation géographique de la cité est loin d'être idéale pour la navigation commerciale (celle-ci n'y est possible que durant quelques mois d'été, la mer Blanche étant englacée le reste du temps), elle représente le principal débouché maritime de la Russie d'alors, la Suède contrôlant la navigation en Baltique. On y importe des tissus et du vin et en exporte du bois, des fourrures et des richesses naturelles. 

Les choses changent en 1704 après une victoire russe sur les forces suédoises. La Baltique s'ouvre à nouveau aux navires russes. C'est également à cette époque le début de la construction de Saint Petersbourg, fruit du désir de Pierre le Grand. En 1722, ce dernier décide de faire de « sa » ville le plus grand des ports russes et limite par décret le trafic d'Arkhangelsk aux seuls besoins de la ville. Les décennies suivantes verront d'autres conflits se dérouler entre ces deux protagonistes avec le même résultat et s'affermir la prédominance de la Russie en Baltique. Durant cette période, l'activité économique s'effondre à Arkhangelsk. C'est l'impératrice Catherine II, « la grande Catherine », qui rétablit l'équilibre entre les deux ports rivaux. En 1762, elle proclame un décret selon lequel Arkhangelsk peut commercer librement toutes les marchandises en appliquant des tarifs équivalent à ceux des autres ports. Le trafic reprend, la cité renaît et c'est toute la région qui profite de ce renouveau. Mais le commerce n'est pas la seule raison de cette expansion nouvelle. 
 
Port de départ de grandes explorations 
Les idées d'exploration arctique et de navigation tout le long des côtes arctiques de l'empire commencent à voir le jour dans les esprits scientifiques russes et l'impératrice Catherine II partage ces vues. En 1765, une expédition part d'Arkhangelsk. Préparée par le grand scientifique Lomonosov (originaire de la région), elle a pour but d'atteindre le Spitzberg et, peut-être, le pôle Nord. C'est Vassili Iakovlévitch Tchitchagov (1726-1809) qui commande la flotte composée de trois navires (Tchitchagov, Panov et Babayev). Bien qu'il eût atteint le Spitzberg, il ne put continuer, bloqué par les glaces et doit renoncer. Même si les résultats sont limités, l'impulsion est donnée.
C'est d'Arkhangelsk que part l'expédition menée entre 1821 et 1824 par Fyodor Litke (1797-1882) à destination de la Nouvelle Zemble. Un siècle plus tard, Otto Schmidt appareillera de ce port pour ses quatre importants voyages dans l’Arctique russe (cf notre article).
Port des convois
Arkhangelsk étant le seul port ouvert en Russie occidentale au cours de la Première Guerre Mondiale, il reçoit les convois d'aide alliée. 




Le développement des installations portuaires s'accélère ; de nouvelles zones portuaires sont créées, les liaisons ferroviaires réaménagées. Le volume des cargaisons transitant par Arkhangelsk atteint 2,8 millions de tonnes en 1916, un niveau jamais atteint auparavant. Mais la révolution arrive et la ville devient un bastion de la Russie Blanche qui ne tombera aux mains révolutionnaires qu'en janvier 1920. Conséquence logique : un nouvel effondrement du transit qui mettra plusieurs années avant de se rétablir, principalement grâce à l'exportation du bois. Arkhangelsk en effet assure près de 40 % des exportations de bois de la nation. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, Arkhangelsk retrouve son rôle de port de destination des convois alliés qu'il partage avec Mourmansk. C'est une importante page de l'histoire du conflit qu'écrivent les équipages de ces navires qui apportent au peuple soviétique depuis les USA de quoi lutter contre les troupes hitlériennes (voir la liste des convois).
A l'issue de la guerre, plusieurs années s'écoulent avant que le port ne commence à être rénové. Cette rénovation est pourtant indispensable si l'on veut y pour suivre une activité (bon nombre d'installations avait été construites en bois pour servir temporairement) mais, dans l’économie soviétique planifiée d'alors, les délais sont longs. Néanmoins, le port s'adapte à la croissance de ses activités. Entre 1960 et 1990, le volume traité est passé de 2,8 millions de tonnes à 5,4 millions. Les produits forestiers représentent plus de la moitié du tonnage traité, suivent les céréales, les équipements industriels et les fournitures destinées à l'Arctique. Les chiffres de l'année 2012 montrent une augmentation de 20% (à 4,9 millions de tonnes pour les onze premiers mois) en un an. Il y aurait ainsi un retour aux chiffres de 1990 mais rappelons que le début de la décennie 90 avait vu une nette diminution des activités). Pour la même période, les statistiques du port de Mourmansk montrent une diminution de 10%.
Actuellement,
En ce début de millénaire, Arkhangelsk est une ville d'environ 400 000 habitants, industrielle (bois et produits dérivés, réparation navale et pêche comptent parmi ses principales ressources) et universitaire : la Northern (Arctic) Federal University (narfu.ru) qui regroupe de nombreuses unités d'enseignement et de recherche se place sous le patronage spirituel de Mikhaïl Lomonosov (1711-1765), scientifique pluridisciplinaire né dans la région et que Pouchkine qualifiait « d'université vivante ». 

Ses rivages d'une quarantaine de kilomètres s'étendent sur les deux rives du fleuve et plusieurs îles. Son port, Severodvinsk, grâce à l'activité des brise-glaces, est ouvert toute l'année. Mais la ville se veut également culturelle. Elle est en effet renommée pour son théâtre dramatique, son théâtre de marionnettes et son ensemble lyrique. Principalement construite en bois jusqu'au début du XXe siècle, elle ne compte que peu de monuments anciens. Mais une nouvelle activité semble devoir y naître. En effet, au mois de décembre 2012, le gouverneur Igor Orlov a annoncé son intention d'en faire également une ville touristique utilisant pour cela, entre autres, le tourisme maritime et fluvial.
Un épisode de la Révolution Russe : le sabordage du brise-glace  Svyatogor à Arkhangelsk (extrait du livre "Brise glaces européens")
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Dessiné par Makarov, il fut construit sous le nom de Svyatogor en 1917 à Newcastle-on-Tyne, Royaume Uni par le chantier Armstrong-Whitworth & C°. En 1918, au cours de la guerre civile, il fut sabordé par son équipage à Arkhangelsk pour tenter d’empêcher l’arrivée des forces anglaises puis renfloué per celles-ci et emmené en Angleterre. Après des négociations menées par L.B. Krasin, le navire retrouve l’URSS en 1921 et prendra le nom de celui-ci à sa mort en 1926. Il participa à de nombreuses opérations de sauvetage maritime parmi lesquelles il faut citer celles des membres de l’expédition d’Umberto Nobile à bord du dirigeable Italia en 1928, imédiatement suivie de celle des passagers du paquebot Monte Cervantes le 25 juillet 1928. Le navire participa également à de nombreuses expéditions scientifiques, pénétrant des régions encore jamais atteintes par la voie maritime. Au cours de la WWII il est utilisé pour ouvrir la voie à de nombreux convois en Arctique. En 1941, lorsque les États Unis rencontrèrent un besoin urgent de brise-glaces, ils proposèrent son rachat à l'URSS. Le marché ne fut pas conclu mais le navire avait passé plusieurs semaines à quai à Bremerton (Washington) où il avait été inspecté par l'US Coast Guard. Celle-ci en tira de nombreux enseignements qu'elle mit à profit lors de la construction de la classe des Wind. Quelques années plus tard, ce seront des navires de cette classe qui seront prêtés à l'URSS par les États Unis… Modifié en Allemagne au cours des années 1950, il prend son allure définitive avant d’être retiré du service en 1976. Depuis 1999, il est musée flottant à Saint Petersbourg.
Krassin, à droite. En arrière, Moskwa et Saint Petersbourg, les deux derniers brise-glaces mis en service en Russie (projet 21900).

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10 octobre 2012

Les voyages arctiques d'Otto Schmidt

 
Le plus important explorateur de l'Arctique soviétique du début du XXe siècle fut sans conteste Otto Yulyevich Schmidt. Né le 30 septembre 1891 à Mogilev, en Russie (maintenant Biélorussie), il étudia brillamment à Mogilev, Odessa et enfin à l'université » de physique et de mathématiques de Kiev. Il s'y fit remarquer par ses premières publications en mathématiques en 1912. Diplômé en 1916, il est l'un des spécialistes de la « théorie des groupes » et se destine à l'enseignement mais la guerre et la révolution contrarient ses projets. Après avoir épousé la cause de cette dernière, la mathématicien devient l'un des responsables du Commissariat du Peuple pour l'Alimentation... puis, au début des années vingt, rejoint un autre commissariat (également du peuple, bien sûr), celui de l'éducation. Il retrouve l'enseignement des mathématiques en 1923 à l'Université de Moscou tout en supervisant la publication des travaux scientifiques russes et en poursuivant ses propres travaux. En 1928, il mène une équipe germano-soviétique d'exploration dans les monts Pamir qui en dresse les premiers relevés topographiques. 


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C'est au cours de cette même année qu'il fait son premier voyage sur un brise-glace, le Sedov. Il s'agit d'explorer l'archipel François Joseph dans le nord-est de la mer de Barents et d'établir une station scientifique permanente sur ces îles annexées par l'URSS en 1926. Schmidt effectuera un deuxième voyage dans la région deux ans plus tard utilisant le même navire, poussant plus loin vers l'est.
Sedov, ex Beothic de Terre Neuve

En 1932, Schmidt est nommé à la tête de l'Administration centrale de la Route du Nord (Glavsevmorput). Cette entité, voulue par Staline, a pour but de rendre possible la navigation tout au long de la côte arctique de l'URSS. Il met alors sur pieds un grand voyage dont le but est de parcourir toute la route du nord d'ouest en est en une seule saison, sans hivernage. Le navire est choisi ce sera l'Aleksander Sibiryakov, un ancien brise-glace canadien renommé en hommage d'un autre explorateur de cette région.
A. Sibiryakov, ex Bellaventure, construit à Glasgow

Le 28 juillet 1932, l'Aleksander Sibiryakov quitte le port d'Arkhangelsk. Son voyage va lui faire traverser la mer de Kara jusqu'à Port Dickson (atteint le 3 août) puis contourner par le Nord l'archipel de Severnaya Zemlya (en russe : Северная Земля ou Terre du Nord), une route encore inexplorée pour atteindre la mer des Laptev. Après une escale à Tiksi, à l'embouchure de la Kolyma au cours du mois de septembre, le brise-glace reprend sa route mais un grave incident technique survient en mer des Tchouktches, mettant l'expédition en péril. Les glaces rencontrées ont provoqué des avaries d'hélice. Privé de sa propulsion, le navire dérive pendant onze jours. Enfin, un gréement de fortune peut être installé grâce auquel, le navire, son autonomie retrouvée, peut traverser le détroit de Bering. Enfin, après 65 jours de voyage, le navire parvient à Yokohama. A leur retour en Russie, Otto Schmidt, le chef de l'expédition, et Vladimir Voronin, le commandant du navire, seront fêtés comme il se doit.

L'année suivante, une nouvelle expédition est mise sur pieds. Le but est maintenant de parcourir la route dans les deux sens. Pour cela, Schmidt va utiliser un autre navire lui aussi aux ordres du commandant Voronin. Mais le navire, bien que tout neuf et spécialement conçu, ne donne pas satisfaction. Construit au Danemark sous le nom de Lena, rebaptisé Chelyuskin, il n'est pas un vrai brise-glace, ce dont Schmidt et Voronin s'aperçoivent tout de suite, avant même le départ de l'expédition. Mais il est trop tard pour reculer. Le départ a lieu en juillet 1933. Plus de cent personnes sont à bord. La navigation, certes difficile, est néanmoins possible mais, parvenu en mer des Tchouktches en novembre, le navire est emprisonné par la glace et entrainé par sa dérive. Il doit être abandonné avant d'être écrasé. Un campement est établi sur la banquise dont tous les occupants seront recueillis par avion en mars 1934.

La technique évoluant, l'aviation est maintenant utilisée pour l'exploration. Schmidt planifie en 1937 une campagne d'exploration ayant l'archipel François Joseph comme point de départ. Destination : la proximité du pôle Nord où une station scientifique baptisée « Pôle Nord 1 » est installée. Les scientifiques qui y travaillent devront être évacués au cours de l'hiver suivant en raison de la dérive jugée trop importante. C'est un brise-glace qui sera chargé de l'opération de sauvetage organisée par le directeur de la Glavsevmorput. Il occupera cette place jusqu'en 1939 devenant alors directeur de l'Institut de Géophysique théorique qu'il créa et vice-président de l'Académie des sciences de l'Urss. Certaines de ses fonctions lui furent retirées sur ordre de Staline dans l'immédiat après-guerre. Il se concentra alors sur des travaux d'astronomie. Le grand scientifique s'éteindra le 7 septembre 1956 près de Moscou. De nombreuses distinctions lui auront été décernées. Il reçut à trois reprises l'Ordre de Lénine, deux fois le Ruban Rouge ainsi que d'autres décorations. Plusieurs lieux géographiques arctiques portent son nom et même un cratère lunaire ainsi que plusieurs musées et instituts.

Tous clichés DR

Pour connaitre toute l'histoire des brise-glaces russes et soviétiques, voir le livre : "Brise-glaces de la Route du Nord et de la mer Baltique" aux éditions MDV.

Pour des informations sur les brise-glaces russes en construction : le blog des navires spécialisés.





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10 septembre 2012

31 août 1986 : perte du paquebot soviétique Amiral Nakhimov


 Hasard du calendrier, il y a exactement un an (jour pour jour!) que nous évoquions la biographie de l'amiral russe Pavel Nakhimov. Outre le film de Vsevolod Poudovkine réalisé dans l'immédiat après-guerre dans le grand style culturel de l'époque stalinienne, bien d'autres hommages furent attribués à ce héros russe. 

Passons sur les nombreuses statues et lieux géographiques pour rappeler que pas moins de quatre croiseurs portèrent son nom ainsi qu'un paquebot. C'est sur l'histoire de ce dernier que nous allons nous pencher aujourd'hui.
Comme souvent dans le domaine des paquebots européens, l'histoire commence sur l'Atlantique Nord... Au cours de l'entre-deux guerres, la concurrence est acharnée entre les différentes compagnies. Il y a les Britanniques (dont la Cunard bien sûr), la renommée Compagnie générale transatlantique française, les Italiennes, la Néerlandaise, la Polonaise... et les Allemandes. Parmi ces dernières, le Norddeutscher Lloyd de Brême fait construire par les chantiers Bremer Vulkan un nouveau navire qui est lancé le 24 mars 1925 sous le nom de Berlin. Achevé au cours de l'été, il quitte Bremerhaven pour New York pour la première fois le 26 septembre 1925. Avec son tonnage brut de 15 286 TJB, ses 174,3 mètres de long et 21,1 de large, son millier de passagers en trois classes, il ne fera pas partie des « grands » de l'entre-deux guerres comme Bremen ou Europa, il ne courra pas après le Ruban bleu. Comment faire avec une vitesse de 16 nœuds ?






Son fait d'armes à lui, c'est un sauvetage. Le 13 novembre 1928, il recueille 23 survivants du naufrage du paquebot britannique Vestris de la Blue Star Line, coulé la veille lors d'une tempête à 200 milles au large de Hampton Roads. 

 Onze ans plus tard, la guerre le transforme en navire-hôpital pour les forces allemandes. Il coule en Baltique le 1er février 1945 après avoir touché une mine. Il ne sera renfloué que quatre ans plus tard. Attribué à l'URSS, remis en état, il navigue en mer Noire pour la Black Sea Steamship Company après avoir été rebaptisé du nom du héros russe. 

Mais il reste bien sûr un navire de la flotte de l'état. A ce titre, il est utilisé comme transport vers Cuba lors de la crise de 1962 puis retrouve les eaux du Pont Euxin. De nombreuses années s'écoulent sans incident et permettent à des travailleurs méritants et à quelques privilégiés du Parti de voyager à son bord.

Cela jusqu'en août 1986. Dans la soirée du 31 août, le paquebot navigue entre Novorossiisk et Sochi. Le vraquier Pyotr Vasev également. Les routes des deux navires semblent devoir se croiser mais un contact radio rassurant écarte toute crainte. A tort... A 23 heures 12, le cargo éperonne le flanc tribord du paquebot qui a à son bord plus de 1 200 personnes. Se déroulent maintenant à bord du vieux paquebot les scènes toujours décrites de la même manière dans tous les récits de naufrage. La gîte s'installe puis s'aggrave. Les lumières du bord vacillent avant de s'éteindre complètement, les embarcations de sauvetage ne peuvent être descendues... Les passagers crient, se rassemblent, certains sautent à l'eau, s'accrochent à ce qui flotte autour d'eux...

La disparition du paquebot est rapide, moins de dix minutes selon ce qu'on entendra ultérieurement. La côte était proche (4 milles), le port de Novorossiisk distant de huit milles. De nombreux bateaux et hélicoptères arrivent donc rapidement pour porter secours comme le fait l'équipage du cargo car celui-ci n'a pas subit de gros dommages. Les chiffres officiels annoncent que 836 personnes sont sauvées et que l'accident a fait 423 victimes (dont 64 membres d'équipage). L'enquête officielle a conclu au partage des responsabilités entre les deux commandants qui furent condamnés à quinze ans d'emprisonnement avant d'être libérés en 1992.

Tous clichés DR.













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10 juin 2012

Le port du Tréport







La limite entre la Normandie (au sud) et la Picardie (au Nord) est marquée par la Bresle. À l'embouchure de celle-ci sur la Manche se trouve le port départemental du Tréport, entouré de trois communes. Deux se trouvent en Normandie : Le Tréport au sud des bassins du port et Eu (bien connue entre autre pour son château et les collections qu'il abrite) à l'est des bassins. Mers, au nord des bassins, est en Picardie.


(Cliché Google Earth)



La région est connue dès l'époque gallo-romaine et les Normands débarquent au Tréport au XIXe siècle. Au XIIe siècle, le cours de la Bresle est détourné ce qui provoque l'ensablement du port et la diminution de son activité au profit de Dieppe, à quelques kilomètres au sud. Quelques années plus tard, un canal est creusé permettant aux navires d'atteindre de gagner une zone portuaire (maintenant disparue) plus proche de la ville d'Eu que le port actuel. Il restera actif pendant deux siècles. Le commerce se faisait au Port Louis Philippe d’Eu que les navires à voile atteignaient par le canal maritime d’Eu. Ultérieurement, c'est Louis Philippe et les travaux qu'il ordonne qui redonnent vie au port du Tréport et à toute la cité.
Le Tréport en 1878 (peinture de Jules Noël - site de la ville du Tréport)

La pêche, malgré le caractère fluctuant de cette activité, a toujours été l'une des ressources principales du port. Sa proximité de la capitale (il en est le port de marée le plus proche) lui permettait de trouver dans l'approvisionnement de la capitale un débouché stable et tout le monde connait les convois nocturnes de voitures d'attelage qui amenait les produits de la pêche au centre de la capitale.


La route du poisson (voir ce site)


Le Tréport est également un port commercial, géré depuis 2007 par la Chambre de commerce et d'industrie du Littoral normand-picard. Son trafic annuel est d'environ 300 000 tonnes (argile, engrais, galets, sel de déneigement, verre pilé...). Le bassin de commerce est un bassin à flot rectangulaire d’environ 350 m sur 120 m présentant environ 700 mètres de quais équipés. L'accès se fait par une écluse équipée d’une porte à marée à 2 vantaux. Il peut accueillir des navires allant jusqu’à 120 m de long et jusqu’à 17,50 m de large, avec un tirant d’eau maximum de 7m. Parmi les navires récemment accueillis figurent :


Lingeborg (IMO 9399399) (données techniques sur Shipspotting.com)

 Sylvia (IMO 9381366) (données techniques sur Shipspotting.com)


Photos copyright Dr Patrick Brard / Agence Adhemar




Enfin, le Tréport c'est aussi un port de plaisance qui peut accueillir plus de deux cent bateaux.

Voir de nombreuses photos du Tréport





































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10 avril 2012

La navigation sur le lac de Brienz (Suisse)


Quittons pour une fois l'eau salée. L'eau douce aussi possède quelques trésors ; quelques-uns d'entre eux flottent sur les lacs suisses comme, par exemple, celui de Brienz. Ce lac, dont l'eau est réputée la plus pure de Suisse, s'étend au sud du canton de Berne entre Brienz (au nord-est) et Interlaken (au sud-ouest). Sa longueur est d'environ 10 kilomètres. La ville dont il porte le nom est connue pour abriter l'école de sculpture sur bois et le musée de l'habitat rural qui expose de nombreux exemples de constructions des différents cantons suisses. À l'extrémité opposée, au sud-ouest, se trouve Interlaken, qui le sépare du lac de Thoune à l'ouest. Les deux lacs sont reliés par l'Aare qui prend sa source dans la région des glaciers. Au sud du lac se trouvent les alpes bernoises et de nombreux sommets célèbres tels l'Eiger ou la Jungfrau. Peut-être est-ce le caractère plus sauvage du lac de Brienz que celui de Thoune qui explique le léger décalage dans le temps de son développement touristique.

Vue des deux lacs depuis le nord : Brienz (à gauche) et Thoune (à droite). Les sommets de l'Oberland au fond.

L'histoire de la navigation sur les lacs de l'Oberland Bernois débute en 1834 à l'initiative des frères Knechtenhofer, tous trois hôteliers à Thoune. Afin de fournir un loisir nouveau à leur clientèle, ils décident alors de proposer des excursions sur le lac à bord d'un petit vapeur baptisé Bellevue. Un orgue mécanique était embarqué à son bord ; pour le plus grand plaisir des touristes britanniques, il jouait "God save the King"...


L'idée est reprise quelques années plus tard par David Gottlieb Matti, hôtelier à Kienholz, petit village à l'extrémité nord du lac de Brienz, tout proche. C'est ainsi que Giessbach, un ancien bateau du Léman, devient en 1839 le premier bateau du lac de Brienz. Il navigue régulièrement entre Interlaken et Brienz, faisant une escale à Giessbach, célèbre pour ses cascades En 1843, le bateau subira un nouveau transfert, gagnant le lac de Thoune et devenant Helvetia.


Au cours de cette même année 1843, Bellevue (celui que nous avons évoqué quelques lignes plus haut) navigue sur l'Aar vers l'est, traversant la jolie ville d'Interlaken pour passer sur le lac de Brienz. Il abandonne son nom pour devenir Faulhorn. Retiré du service en 1856, il est transformé en remorqueur pour servir à nouveau sur le lac de Thoune. Il y coulera en 1864.

Le tourisme se développe et la recette de l'hôtelier devenant armateur semble efficace. En voici un troisième : en 1856, le propriétaire de l'hôtel Giessbach décide d'armer un petit bateau qui porte le même nom. Cette concurrence est mal vue par les frères Knechtenhofer et d'anciens concurrents maintenant réunis au sein de la "Vereinigte Dampfschifffahrtsgesellschaft für den Thuner und Brienzersee" (Compagnie réunie de navigation à vapeur sur les lacs de Thoune et de Brienz), en abrégé VDG. En 1857, la VDG achète à la fois l'hôtel et le bateau. Ce dernier est démoli dans les mois qui suivent et l'hôtel revendu en 1870.

L'année 1857 voit arriver sur le lac de Brienz un bateau construit par Escher Wyss et baptisé Interlaken I. Retiré du service en 1951, il aura donc connu une carrière particulièrement longue.

Le quatrième bateau à naviguer sur le lac de Brienz est le Giessbach (troisième du nom) construit en 1859. Il est le deuxième bateau neuf à naviguer sur le lac de Brienz. De nombreux réaménagements et rénovations lui permettront de naviguer jusqu'en 1956. Il sera vendu à la démolition l'année de son centenaire.

Commandé par une compagnie concurrente de la VDG (mais dont la durée de vie ne dépassera pas quelques mois), Oberland (1870-1925) puis Brienz (1871-1956) furent les deux premiers bateaux-salons à naviguer sur le lac de Brienz, toujours pour le compte de la VDG qui avait acquis le premier en cours de construction chez Sulzer à Winterthur. Tous deux connaîtront une belle carrière ; ils seront retirés du service respectivement en 1925 et 1957.


Jungfrau, mis en service en 1898, construit par Escher Wyss, est lui aussi un bateau-salon. Il sera retiré du service en 1942, inondé par des actions de vandalisme en 1949 et démoli en 1951.

Qu'est-ce qu'un bateau-salon ? Le bateau-salon est un bateau à deux ponts. Il succède chronologiquement au bateau demi-salon caractérisé par un pont arrière situé à un niveau plus élevé que le pont avant. Initialement, les deux ponts avant et arrière (par rapport aux roues) étaient à la même hauteur, définissant le bateau à pont plat. Cette évolution permit d'augmenter le confort des passagers. Nous sommes maintenant dans ce qui est appelé sur le Léman la flotte "Belle Époque". Ce sont ces bateaux qui ont formé l'image du bateau des lacs suisses arborant le pavillon carré rouge à croix blanche. Un intéressant document détaillant les données de la flotte "Belle Époque" lémanique à télécharger se trouve sur le site officiel du canton de Vaud, colonne de droite, avant dernier lien en partant du bas "Description de la flotte: texte intégral".

Une autre modification importante de la navigation sur les lacs de Thoune et Brienz est due à la construction dans la région, au cours des années 1870-1910, de nombreuses voies ferrées par des compagnies indépendantes. Les lignes de transport par bateau qui, de bateau d'excursion ont acquis le statut de moyen de transport commercial, sont modifiées en fonction de l'aménagement de nouvelles gares ferroviaires. Les horaires des bateaux sont aménagés en fonction de ceux des trains. La fréquentation des bateaux par les touristes acheminés dans la région par le train vient largement compenser la perte des lignes lacustres régulières. L'ensemble forme un système de transport que l'on qualifierait aujourd'hui d'intégré. Le regroupement au sein d'une entité unique de ces lignes ferroviaires indépendantes mais également des compagnies de navigation des deux lacs apparaît, rétrospectivement, inéluctable. Mais il fallut des négociations difficiles pour aboutir, en 1913, à la réunion de ces compagnies au sein de la "Berner Alpenbahn-Gesellschaft Bern–Lötschberg –Simplon" (Compagnie bernoise du chemin de fer des Alpes Berne – Lötschberg – Simplon), en abrégé BLS. C'est cette compagnie que l'on connaît encore en 2012.

Le Lötschberg que l'on voit aujourd'hui sur le lac de Brienz a été construit par Escher Wyss de Zürich et mis en service en 1914.


Essentiellement conçu pour le tourisme, il peut également transporter des marchandises et quelques animaux mais ne navigue que neuf jours avant que la guerre n'arrête son exploitation. Au retour de la paix, la "Belle Époque" est révolue, on parlera maintenant de guerres et de crises économiques. Après avoir été désarmé pendant toute la durée de la guerre, il ne reprend son service qu'en 1923. En 1968, sa propulsion est convertie au fuel. Rénové au cours des hivers 1988-1989 et 2001-2002, il retrouve ses emménagements d'époque.







On le rencontre régulièrement sur le lac de Brienz où vous le reconnaîtrez facilement : c'est l'un des deux vapeurs suisses dont la coque porte un bandeau de couleur verte. L'autre, Blümilsalp, n'est pas très loin : vous le verrez sur le lac de Thoune.

L'entre-deux guerres qui aurait dû être faste fut en fait marquée par la crise économique à laquelle la compagnie dut s'adapter. Il faudra attendre la seconde moitié du vingtième siècle pour voir arriver de nouveaux bateaux sur le lac. Ce sont eux (avec bien sûr le Lötschberg que nous avons vu plus haut) qui constituent la flotte actuelle. Elle comprend donc :
- Jungfrau (1954, Bodan Werft, 48 mètres, 235 tonnes), ancien bateau du lac de Thoune transféré en 1999) :



- Interlaken (1956, Bodan Werft, 42,10 mètres, 138 tonnes) :


- Iseltwald (1969, Oswag Linz, 37,10 mètres, 74 tonnes) :


- Brienz (1981, Bodan Werft, 53 mètres, 265 tonnes) :



Tous les clichés de cet article proviennent du site officiel de la compagnie BLS qui exploite ces bateaux et de nombreuses lignes ferroviaires de la région de l'Oberland Bernois. Autres photos de la flotte actuelle.



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10 mars 2012

Les "Ekranoplan" de l'ère soviètique

Petite devinette soviétique : "Il a la forme d'un avion mais il ne vole pas, il ne ressemble pas à un navire mais il flotte, il atteint la vitesse de 600 km/h et navigue au dessus de l'eau. Qu'est-ce que c'est ?" Même à la grande époque du communisme, peu de citoyens du paradis des travailleurs connaissaient la réponse qui est :"C'est un ekranoplan, bien sûr". Ce terme que l'on pourrait traduire par "avion de surface" est un vocable générique sous lequel on rassemble plusieurs projets d'engins secrètement mis au point par les ingénieurs soviétiques au cours des années soixante sous la direction de Rotislav Yevgenievich, plus connu sous le pseudonyme d'Alekseyev et auquel on doit également certains hydrofoils. Le principe consiste à utiliser les gaz d'échappement des moteurs de l'engin et les turbulences dues au mouvement de l'appareil en les dirigeant sous sa coque afin de créer un coussin d'air virtuel ce qui explique le préfixe anglicisé de GEV pour Ground Effect Vessel. Libéré des frottements, l'engin de transport peut ainsi atteindre des vitesses très élevées et, ne "volant" qu'à quelques mètres au dessus de l'eau, échapper au contrôle radar. Plusieurs programmes furent dérivés de ce principe en faisant varier les dimensions et les buts d'utilisation. On distingue donc pour ce qui est des applications soviétiques militaires (car quelques applications civiles d'autres nationalités virent le jour) différents modèles qui, bien que reposant sur le même principe, diffèrent par leur taille, leur utilisation supposée et leur type de propulsion :

- le MK surnommé "Monstre de la Caspienne" puisque c'est sur cette mer intérieure qu'il fut pour la première fois repéré par un satellite américain en . Il disparaît lors d'un accident (officiellement dû à une erreur de pilotage) en 1980 ce qui met fin au projet de développer de taille encore supérieure.



- l'Orlyonok, fait son premier "vol" en 1973 et connaît une utilisation en série par la marine russe dans les années 90. Il présente la particularité de pouvoir vraiment voler jusqu'à une altitude de 3 000 mètres, ce qui, bien évidemment, en fait un engin particulièrement intéressant dans le domaine militaire.


- le Loun, de dimensions plus modestes que le MK, était susceptible d'embarquer missiles et passagers. Il est actuellement inerte à Kaspiysk, au Dagestan.


- le Spasatel, dérivé du MK, mais jamais achevé, il avait pour vocation de servir d'engin de sauvetage de grande capacité (pouvant accueillir jusqu'à 600 personnes). Sa construction fut lancée en 1988

Les deux vidéos que nous vous proposons, certes un peu longues, ont le mérite de montrer plusieurs types d'engins naviguants "spéciaux" mais surtout de montrer les différents types d'Ekranoplans :




Et maintenant, une seconde devinette : "Pourquoi évoque-t-on ici ces engins ?". Outre qu'il existe, peut-être, une chance de les voir à nouveau surgir, les Ekranoplan ont récemment fait parler d'eux. Le 16 février 2012, Oleg Kondrashov, maire de Nizhny Novgorod, évoque la possibilité d'exposer le Loun et le Spasatel dans un musée en plein air qui reste à installer sur les bords de la Volga. C'est en effet dans cette ville que furent construits ces engins dont il serait effectivement dommage qu'ils tombent dans l'oubli.

Quelques liens : précisions techniques, clichés, précisions aéronautiques, nombreuses photos du Loun au Dagestan.

Enfin, pour vous aider à trouver d'autres documents ou informations, voici le résultat d'une recherche faite sur Google en utilisant l'orthographe cyrillique экраноплан.





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